Réinfosphère et dissidence : ne prenons pas nos désirs pour la réalité.

Diablesse et angeletteJ’aime la réinfosphère, appelée stupidement « fachosphère » par ces gauchistes qui pourtant font du fascisme comme Monsieur Jourdain faisait de la prose, sans le savoir. Elle est utile à la dissidence, en faisant connaître ce que cachent les médias de propagande ou ce qu’ils présentent de manière si biaisée que l’on ne peut que crier au mensonge et à la manipulation. Il y a également, dans cette « réinfosphère », les sites d’opinion. Naturellement, ils sont bienvenus, puisqu’ils combattent les idées creuses (cœliodoxies) des bisounours et les distorsions néfastes de la « bien-pensance », naguère « pensée unique », au service des monopoles apatrides mais sis principalement à Wall-Street.

Mais… D’une part, les mêmes arguments sont trop souvent ressassés en boucle, avec des explications du genre « pourquoi » -au choix : Trump a gagné, Fillon a gagné etc… En réalité, les causes d’un évènement politique sont cachées, certainement moins accessibles par des supputations sociologiques superficielles qu’enfouies les désirs singuliers des citoyens, et ne se révèlent pas par une « analyse » logique ad hoc. Il faudrait plus de temps et de recul historique pour se hasarder à avancer sans plus d’examen une hypothèse causale. Quant aux conséquences vaticinées, tant qu’elles ne se révèlent pas au fil du temps, elles ne sont que vaines spéculations habillées de fausse logique. Il faudrait posséder l’acuité politique d’un Bainville analysant le Traité de Versailles pour qu’il en aille autrement. Pourtant, de tels articles répétitifs ne manquent pas, tant dans la réinfosphère que dans les médias de propagande : de fait, ces derniers donnent le ton, et la dissidence tient un discours en contre-dépendance du discours officiel au lieu de pratiquer une sérieuse analyse anthropologique susceptible de disséquer les phénomènes. Il y a des exceptions, heureusement, mais elles sont rares, et les écrits ne varient le plus souvent que par le génie stylistique de leurs auteurs plutôt que par la rigueur de l’analyse. C’est une sorte de psittacisme finalement nuisible à l’avancée des idées.

D’autre part, et c’est plus grave, l’évènement mal analysé finit par nous faire prendre nos désirs pour des réalités. Il est bien entendu légitime de se réjouir de tel ou tel progrès de la pensée dissidente, patriotique, souverainiste, démocratique, quelque part dans ce monde Occidental soumis à la tyrannie des forces colossales mises au service des intérêts de la finance apatride donc mondialiste. On ne peut qu’apprécier que Viktor Orbán prenne des mesures sévères contre l’invasion de son pays et gagne un référendum (malheureusement invalidé !), que les pays du groupe de Visegrád agissent en commun dans le même sens, qu’Alternative für Deutschland ou le parti de Geert Wilders progressent de manière significative lors d’élections nationales. La tendance naturelle est d’en conclure que la résistance progresse. C’est oublier que l’adversaire détient le pouvoir et peut user sans frein de la propagande des médias qu’il détient, et de la force tyrannique de la loi dont il a encore, et peut-être pour des décennies, le monopole. Car l’adversaire s’est organisé pour durer envers et contre tout.

Il s’ensuit une croyance désastreuse dans « l’effet domino » : l’on s’imagine qu’une petite impulsion locale finira par se répercuter de loin en loin jusqu’à effondrement de l’édifice. Or rien n’est plus faux. L’opinion publique est versatile, liée qu’elle est aux intérêts du moment tels qu’ils sont perçus par les citoyens. Telles circonstances particulières ont produit tel évènement jugé positif ; mais que les conditions changent quelque peu, et l’opinion bascule. Autrement dit : rien n’est jamais acquis. Nous venons d’en avoir la preuve dans l’échec de Norbert Hofer devant un insignifiant candidat écologiste en Autriche. Pourtant, l’on ne manquait pas de penser qu’il bénéficiait de la préférence populaire. Cette croyance en l’effet domino est démobilisatrice, en sus elle finit par faire prendre au sérieux les sondages et projections orientés que délivrent les médias de propagande pourvu qu’ils nous annoncent ce que nous espérons. Souvent, l’on finit par déchanter faute d’avoir agi.

On peut ainsi soumettre à la critique (constructive !) les espoirs soulevés -très légitimement- par l’élection de Donald Trump. Indubitablement, ce fut un soulagement pour tous les dissidents que nous sommes de voir la candidate de Wall-Street et des lobbies décadents, personne sanguinaire qui plus est, éloignée du pouvoir. On a conclu trop vite que l’horizon de la résistance s’éclairait. C’était compter sans le pouvoir réactif de l’Europe de Madame Merkel et de Monsieur Junker (cette Europe que l’on prétend bien trop hâtivement être en voie de ruine !) d’une part, du parti Démocrate appuyé par les monopoles et des milliardaires terroristes comme Sorros d’autre part. On connaît les désordres occasionnés aux États-Unis par les manifestations gauchistes virulentes, on sait moins que l’on exige le décompte des voix dans trois États et que de puissants groupes de pression tentent de dissuader les grands électeurs de voter prochainement pour Trump. Et quand bien même Trump deviendrait président – ce que je souhaite, il devra compter avec la configuration des forces politiques et économiques. Il y a Wall-Street, le Pentagone, le Congrès, les groupes de pression autoproclamés « progressistes », il devra donc ajuster pragmatiquement sa politique, et rien ne permet de pronostiquer sur la nature de la politique réelle qu’il pourra mettre en œuvre. Il serait donc naïf, encore une fois, et contre-productif, que d’imaginer les tyrans européens descendre au cercueil à l’approche de Donald Trump chevauchant son destrier. « Aide-toi, le Ciel t’aidera », disait le poète : tant mieux si Donald et Vladimir créent un jour des conditions internationales favorables à nos actions, mais cela ne nous exonère d’aucune responsabilité quant à notre propre destin.

Il est du devoir de tous ceux qui, dissidents, participent à la réinfosphère et aux sites de résistance de ne pas se laisser aller à ces fantasmes. Il n’est certes pas interdit de rêver, mais il faut savoir faire la part du rêve et celle de la réalité et ne pas croire que les alouettes nous tomberont toutes rôties dans le bec. Il reste à la dissidence un très long chemin à parcourir, semé d’embûches, de souffrances, avec seulement l’espoir d’une solution heureuse pour nos Peuples. L’espoir, non la certitude. Cela veut dire qu’il faut que la réinfosphère et les sites de la dissidence changent de partition et qu’ils cessent de fonctionner en vase clos en se berçant d’illusions. Il serait utile que s’instaure partout où c’est possible des échanges portant sur une réflexion anthropologique fondamentale permettant de saisir les causes réelles, efficientes, qui ont amené la situation actuelle, et de les combattre. Ces causes, nous croyons les connaître : rien n’est moins sûr. Autrement, répondre au coup par coup des actions néfastes sans identifier leurs motivations, c’est certes tactiquement nécessaire, mais stratégiquement insuffisant. C’est laisser l’adversaire maître du jeu. Les enjeux sont trop importants pour que nous en restions là.

Vautrin

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