Non mais !

Y a pas à dire, il y va fort, le Raymond ! Quel oeuf ! Bien sûr que j’étais sur la photo à Buckingham. C’est même moi qui menais le bal. Explication : depuis qu’il avait montré chez Merkel qu’il ne savait pas marcher, encore moins sur un tapis rouge, Flamby avait besoin de leçons de maintien. Le maître de balai… pardon : de ballet… de l’Elysée, après s’être fait consciencieusement piétiner les arpions, a réfléchi. « Marchez sans contrainte, Sire, que je voie ce qui vous conviendrait. » Ainsi fut fait : devant la démarche dandinante et un tantisoit chaloupée du Sire à cacheter, il fut conclu que le pas qui conviendrait le moins mal au potentat était celui d’un manchot.

Et alors ? Notre allure n’a rien en soi de ridicule, à nous autres palmipèdes. Ç’est glissant, la banquise, et l’on ne nous verrait quand-même pas y marcher comme la girafe, cette bestiole bricolée qui perd tous ses boulons dès qu’elle bouge. Pas plus que nous ne pouvons marcher comme le chameau, autre bestiole faite de bric et de broc. Remarquez… le maître de ballet y avait pensé, au drolumadaire (ne pas confondre avec le chalumeau, qui bosse deux fois plus), vu que par les temps qui courent ça aurait fait drôlement branché côté électeurs mosquétaires. Mais là, Rottweiler a tiqué : « Déjà qu’on dit que je suis un chameau, si en plus toi tu marches comme un dromadaire, les clebs vont aboyer mais peut-être bien que la caravane ne passera pas ! Un brave pingouin, ça te rafraîchira les idées !« 

Je dis pas… Nous autres, on s’en fout, du maintien, pour ce qu’on a à glander sur la banquise : chasser le poissecaille, bouffer, copuler comme des bêtes, couver des oeufs, y a rien de diplomatique là-dedans. Un potentat, c’est différent. Mais, hein ? Il faut bien que les puissants de la Terre aient une allure, et à l’impossible nul n’est tenu. N’empêche : je tiens à déclarer publiquement que je n’ai pas été, mais alors pas du tout, volontaire pour ce travail. En fait, on m’a piégé.

Ouais.. J’étais peinard chez PoPole, au Sud; trois-quatre manchotes pour mes soirées, une bonne tournée d’alcool de poisson avec les copains le samedi soir, tout baignait dans l’huile de phoque. Et voilà-t-y pas que se pointe un brise-glace. Nous autres sommes curieux : on mate tout ce qui sort de l’ordinaire. Et justement, v’la que débarque un escogriffe qui se présente comme un certain Montambour, se disant ministre du redressement productif. Redressement productif : avec un titre comme ça, le type doit être un chaud lapin ! D’ailleurs, il nous balance un tas de photos pleines de moukères en tenue d’Eve : « Ah ! Paris ! French can-can, Folies Bergères… Ça vous dirait pas, au lieu de vous les geler ici ? » Les copains préfèrent se trisser, mais moi je discute un peu avec le gars. Il me propose un petit boulot : marcher d’un grave pas et d’un train de sénateur, et ensuite à moi Pigalle !

Je m’embarque, débarque à Lorient, rembarque pour Paname, débarque.. Oh là ! Là ! V’la Rottweiler qui me vole dans les plumes, m’affuble du Radis (emblème des socialistes) et me commande d’apprendre la bonne démarche et le bon maintien à Flamby. Ben dis-donc, quelle galère ! L’est un tant soit peu lourdeau, le Sire ! Au bout de quinze jours, il n’a pas progressé d’un poil de hareng. La mère Bitaura a une idée : yaka me laisser aller devant, Mimolette essaiera de marcher comme moi. Mais on m’effacera des photos officielles, histoire de ne pas faire boyauter les citoyens. Je n’appartiendrai pas à une minorité visible (d’ailleurs je suis mormon, pas musulman). En attendant, Pigalle, macache comme ils disent ! Je me suis fait avoir. Et pour s’esbigner en loucedé de l’Elysée, Tintin !

Donc voilà ! Mais je vais me venger. Il y a une souris qui m’a à la bonne, à l’Elysée, et elle peut faire passer des messages dehors en loucedé. Alors je me suis dit que puisque chez Raoul on sait qui je suis, je pourrais bien moucharder, raconter les scandales et secrets d’alcôve, et les vilaines fumisteries qui se concoctent dans les palais socialistes. Ce n’est pas cela qui manque : chaque jour ils commettent un méfait pendable. Raymond est d’accord : j’aurais désormais ma rubrique, « le Billet d’Alfred Le P. » dans ce canard. Pas tout le temps, hé, il faut bien se gaffer que je suis surveillé. Mais le plus souvent possible. Tiens, par exemple, j’en ai entendu une bonne : il paraît que chez certaines femmes journalistes (à 75 à gauche), les derniers outrages seraient les premières politesses. Pas mal !

A bientôt !

Alfred le Pingouin.

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