L’État est une huître vorace

L’État n’est pas la solution, au contraire : c’est lui le problème. Nous ne cessons de le dire et d’éprouver chaque jour la vérité de cet aphorisme. Surtout lorsque l’État est aux mains de personnages médiocrissimes, comme c’est chez nous le cas depuis quelques décennies, le phénomène culminant avec l’arrivée au pouvoir d’une bande d’idéologues pernicieux. Très peu de monde en France, connaît la pensée de Frédéric Bastiat, ce penseur libéral dont les idées étaient très proches des nôtres. Il écrivait notamment, dans un ouvrage de 1850, intitulé La loi : « Il y a trop de grands hommes dans le monde; il y a trop de législateurs, organisateurs, instituteurs de sociétés, conducteurs de peuples, pères des nations, etc. Trop de gens se placent au-dessus de l’humanité pour la régenter, trop de gens font métier de s’occuper d’elle ».

Cette folie légiférante, je l’ai moi-même souvent dénoncée sous le nom d’anthroponomie, c’est-à-dire le fait patent que l’État, sortant totalement de ses vrais rôles régaliens, qui sont, je le rappelle encore, la défense du territoire national, la sécurité intérieur et la diplomatie, viole l’autonomie des personnes en s’immisçant dans leur privé jusqu’à dicter dans le détail la conduite de chacun. C’est insupportable, comme on peut l’éprouver en prenant du recul par rapport à ces contraintes devenues tellement banales que leur caractère totalitaire finit par être vécu comme « naturel ». Par exemple l’obligation de boucler la ceinture de sécurité, ou encore celle de placer des détecteurs de fumée dans son appartement, ou encore l’obligation de placer des appareils électriques « normés » (même s’il en existe de plus fiables et moins gourmands en énergie), ou même la velléité d’interdire la fessée appliquée à d’insupportables petits socialistes en herbe. Peu à peu, le citoyen perd sa citoyenneté et son autonomie, c’est-à-dire cette faculté qu’il a de faire, en toute responsabilité, sa propre loi. On fabrique ainsi, sous couvert de règlements patiemment instillés et surveillés par une caste de fonctionnaires, des peuples d’esclaves. Le Meilleur des Mondes d’Huxley n’est pas une fiction : c’est l’abominable réalité quotidienne incarnée au plus haut point par l’idéologie socialiste, laquelle est partagée par la droite caporaliste et étatique.

Naturellement, ce totalitarisme « mou » fait de multiples victimes, sans pour autant susciter « ces haines vigoureuses/Que doit donner le vice aux âmes vertueuses ». En voici un exemple édifiant. Le Midi-Libre faisait état, en décembre dernier, du drame dont est victime un jeune conchyliculteur du côté de Loupian (Hérault). Ce jeune homme (27 ans) travaillait depuis l’âge de 17 ans dans l’exploitation paternelle. Le père, à 74 ans et de santé ébranlée, a dû abandonner l’exploitation, et logiquement le fils, bénéficiant d’une expérience professionnelle de dix ans, aurait dû prendre la succession. La DDTM (Direction Départementale des Territoires et de la Mer) n’y voyait guère d’obstacle. C’était compter sans Sa Bouffissure l’État. Car, sachez-le, pour reprendre la direction d’un mas ostréicole, il faut … une validation bureaucratique étatique. Cette validation implique que l’impétrant soit titulaire d’un baccalauréat de culture marine suivi d’un stage de 280 heures. Ce bel arrêt infirme les dispositions antérieures, sages, qui disaient que l’expérience professionnelle suffisait à l’entreprise. Et le règlement étant le règlement, summum de la stupidité et de l’injustice, l’exploitation va devoir cesser à cause des abus imbéciles de l’État. Un chômeur de plus : l’État est, de vrai, une fabrique de chômeurs (9 millions à ce jour, selon Le Parisien). Mais, après enquête, il est facile de voir que c’est pratiquement pour tout métier pareil ; j’ai appris avec stupeur que pour élever chèvres et moutons, il fallait un diplôme !

On voit bien la contradiction ubuesque, née de l’anthroponomie : l’expérience et le savoir-faire professionnels ne pèsent rien devant un chiffon de papier appelé « diplôme ». Et l’on s’étonne ensuite que les entrepreneurs répugnent à embaucher des jeunes gens frais émoulus des lycées professionnels, IUT et toutim, dûment diplômés mais parfaitement ignares en matière de technique. La vérité est que l’enseignement ne fait que gaver les élèves de belles théories aussi fumeuses qu’inutiles, et néglige totalement l’essentiel. Il est vrai que, comme le disait un humoriste Anglais, « Les hommes d’action entreprennent, les autres enseignent » : les cuistres n’ont que peu le sens des réalités industrielles. Il faut savoir ce que l’on veut : ou bien de petites oies gavées dont le cerveau est malade, ou bien de vrais professionnels. La technocratie étatique a choisi. Et ce choix provoque non seulement des drames, mais l’écroulement industriel de tout un pays.

Tel est l’un des aspects d’une réalité quotidienne qui peu à peu fait du citoyen un sujet, un esclave. J’ai beau être un homme pacifique (et non pacifiste), lorsque je pense à cette réalité-là, je rêve de mitrailleuses. Comment rendre au citoyen son autonomie, sa responsabilité, sa compétence ? Car là gît le problème politique, et non pas dans l’absurde projet de marier les déviants. En finir avec l’État envahissant, que les niais croient rémunérateur alors qu’il est la source de presque tous nos maux. Difficile, alors que jamais les Français n’ont vécu en démocratie. Ils s’imaginent que l’autonomie -la « liberté » comme ils disent – c’est de pouvoir s’adonner sans contrainte aux plaisirs. Ils ne savent pas ce que c’est que d’être responsable, aussi vivent-ils la tyrannie étatique comme une donnée naturelle. La quiétude de l’esclave, en somme. Ils regimbent mollement contre les excès ubuesques des socialistes et paradoxalement, à 80%, plébiscitent l’apprenti tyran Obama qui veut imposer la même anthroponomie aux Américains. Quelle contradiction !

C’est cependant un état transitoire ; un jour, l’Histoire changera, nous changerons de société. C’est forcé : l’Étatisme est la ruine, donc il faudra bien se débarrasser de l’État. Mais combien de malheurs, encore, avant cette aube ?

Sacha.

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