Captain Wreck, le scooter coule !

RVB de base« Bwahôôô ! fis-je, c’est la grosse baffe ! » Nous étions en train de regarder les résultats des municipales à la télé, Alonzo Tromondada, La Conscience et moi. « Ouais, dit le psy, je pense avoir du travail après-demain pour requinquer le roi. ». « Profitez de ce temps de repos, lui conseilla La Conscience, tant qu’il est avec les autres vassaux, à se faire dicter sa politique étrangère par l’Obama, vous avez des loisirs. » « Le G8 devient G7. Qu’est-ce que ça change ? », demandais-je ? « Pas grand-chose, répondit La Conscience, ce n’est qu’un club de parlotes entre gros cons. ». « Bon… proposa Alonzo, si nous allions visiter ces dames chez Madame Prune ? » L’idée de passer l’après-midi en compagnie de demi-mondaines me plaisait assez, malheureusement le téléphone portable de Tromondada s’interposa. Le psy écouta et pâlit : « Merdre ! Il est déjà de retour et veut une séance … séance tenante ! » « Oh oh !,  ricana La Conscience, on dirait que ses pitreries à s’escrimer contre Vladimir à propos de la Crimée comptent moins que la déculottée infligée par les citoyens à ses sbires ! ».

Quelques instants après, La Conscience et moi nous tenions derrière l’écran. La caméra donnait dans le cabinet d’Alonzo. Bientôt, Soliveau le Microscopique entra, affichant un air débonnaire, se dandinant selon son habituelle manière disgracieuse. Mais cette allure changea bien vite après qu’il eut congédié les gardes du corps et refermé la porte du cabinet. Tout soudain on eût dit un poivrot se réveillant affligé d’une formidable gueule de bois. « Ah ! Docteur ! Docteur ! couina-t-il, sauvez-moi ! » . Alonzo Tromondada ne se laissa pas démonter : « quel danger, sire, vous menace ? » demanda-t-il,  doucereux. « Il y a que mes maudits sujets m’en font des vertes et des pas mûres, gémit le monarque, quels résultats horribles ! Le pire scénario de mes cauchemars est en train de se réaliser ! »

« Cauchemars ?, questionna le psy, en avez-vous des souvenirs précis ? » « Hououou voui, hulula Soliveau, je suis sur mon scooter de triomphe, et m’apprête à recueillir les vivats de la foule. Mais au lieu de visages en liesse, les sourires s’éteignent. Plus j’avance, plus les visages deviennent gris et menaçants, les bouches se tordent, les ongles deviennent des griffes acerbes… » « Acerbes ? Vous voulez dire acérées, je suppose ? » « Oui, ou à Croates, si vous voulez !  grommela le monarque, dont l’acrimonie mêlait sans doute la Crimée et le Kossovo, en tous cas voilà que s’élèvent des cris et des injures. On me balance des trognons de choux, des tomates pourries, et même de vieux préservatifs usagés ! » Le psy nota en gros sur son carnet : « préservatifs = condoms = con d’homme ® métaphore obsédante, chien alpha raté ». « Il y a sûrement de ça ! » gloussa La Conscience.

« Mmmm… fit Alonzo, poursuivez, Sire ! » « Et pis alors, et pis alors… Des mains sales m’agrippent, je suis jeté à bas du scooter, on déchire mes vêtements, et je me retrouve tout nu dans une rue soudain déserte. Y a plus personne, qu’une passante au sourire narcotique… » « Précisez : narcotique ? érotique ? sardonique ? » « Non, non, nar… » « Narquois ? », suggéra Tromondada. « Heu nar quoi ? Je sais pas quoi, en tous cas c’est pas un gentil sourire, on dirait qu’elle se paie ma tête ! » Le psy nota : « Figure de la Némésis,  Rottweiler probablement », puis : « Revoyez-vous souvent ces scènes en rêve ? » « Voui, vous savez, c’est à récurer ! » geignit Soliveau. « Récurrent, corrigea Alonzo. Je suppose que vous faites le parallèle entre ce cauchemar et le résultat du premier tour des élections municipales ? »

Soudain, le roi explosa : « Ces gredins ! Ces gredins ! On les laisse librement choisir nos candidats pour maires, et voilà qu’ils font tout le contraire ! (« Meurtre du maire socialiste = meurtre du Père », nota Alonzo) Ils élisent des phlébitiques… » « Vous voulez dire : plébéiens ? », suggéra le psy. « Si vous voulez ! Donc ils élisent des plébéiens, comme vous dites, et surtout des gens de chez mon pire ennemi ! » « Quel pire ennemi ? » demanda sournoisement Tromondada. « Les gens de chez… Ak ! Ak ! Ak ! s’étouffa Soliveau, je ne peux pas prononcer le nom de… de… de Sarko ! Oh ! Je l’ai dit ! Je l’ai dit ! » « Ben donc !, ricana La Conscience, le flicage et les pseudo-affaires, ça n’a pas marché ! »

Cependant, Tromondada : « C’est donc cela le pire scénario ? Celui qui vous laisse nu dans une rue déserte en butte au sourire narquois de Madame… ?» « Heu… Peut-être, maugréa le monarque, mais ils ne perdent rien pour attendre : je vais fonder un Parti Unique et rendre le vote obligatoire en sa faveur ! » « Hum, hum, fit le psy, mais dans l’immédiat ? » « Oh ! Même mes obligés me harcèlent : les éléphants du Parti pensent que je suis coincé. Faut qu’tu bouges, qu’y disent ! » Soliveau demeura un moment silencieux, puis : « Oh mais ! Je vais contre-attaquer, moi ! Parce que j’ai raison, moi ! Je suis le Roi, tout de même ! Il y a un second tour dimanche prochain, on va voir ce qu’on va voir !… » On eût dit un vieux coq déplumé se hausser sur ses ergots élimés. Il commença alors un soliloque qu’Alonzo retranscrit fidèlement sur son carnet, sans interrompre son patient :

« Être ou ne pas être Roi, là est la question ! Soit il est bon de trop en faire, alors c’est la populace que ça agace et qui, finalement te dit merde, soit il est bon de ne pas en faire assez, et alors c’est Brussel qui te botte le fessier… Or j’ai un devoir sacré : changer cette société, effacer la différence insupportable des sexes, faire disparaître le blanc au profit du gris, éradiquer le capitalisme… C’est ma Mission, et j’ai raison… » Tromondada nota : « paraphrénie : aucun progrès ! » « Adoncques, comment continuer sans changer de cap tout en faisant croire que j’en change ? Faudrait que je fasse une annonce avant jeudi, mais… Mais voilà : je fiche le camp du G7 pour préparer la contre-attaque, et voilà que les chinetoques se pointent. Xi Jinping… Et pourquoi pas Mitsouhirato, tant qu’y z’y sont ? »  Puis soudain, prenant conscience qu’il était dans le cabinet du psychiatre et non dans son bureau : « Ah ! Docteur ! Ne faites jamais de politique ! » « Je m’en garderais bien ! » répondit Alonzo tout en notant : « perte du principe de réalité, absence de conscience du lieu où il se trouve ; j’ai déjà vu ça ».

« Hi hi ! fis-je, quand le Cambadélis prétend que le roi déteste les réactions à chaud… On est servi, dirait-on ! » En tous cas, cette confession involontaire semblait avoir ragaillardi Soliveau : « Bon, pour les municipales, c’est plié, je crois. Mais je vais prier Saint Marx de faire un petit miracle pour moi, histoire de limiter les dégâts dimanche. » « Marx… questionna Alonzo, c’est un intercesseur auprès de Dieu ? » « Après de mon Père de Jarnac, oui, oui ! En doutiez-vous ? », menaça le roi ? « Il ne m’appartient pas d’en juger », répondit prudemment le psy, qui griffonna in petto : « isostasie du délire ; pas avancé depuis le début » « Bon… Après ça, je vais virer Zayrault et garder les meilleurs… » Les meilleurs, pensai-je, c’est à-dire les pires : Valse, Bitaura, le Naja, Duflotte… « Et envoyer à la populace une giclée de gaz Zevouzékomprik ! »

Tromondada se contenta de relever l’étrange nom du gaz, tandis que Soliveau quittait le cabinet. Puis, se tournant vers la caméra : « vous connaissez ce gaz, vous autres ? » « Oui, répondis-je, De Gaulle l’avait utilisé en 1958 à Alger. » « Depuis,  commenta La Conscience, il a été perfectionné. Le type qui vous dit : « j’ai compris le message » vous envoie une giclée du gaz, provoquant une violente inflammation de la cornée dont les effets durent le temps d’un vote. Ensuite, évidemment… » « Belles manières ! » grinça le psy. « On appelle ça « démocratie » », dis-je.

Alfred.

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