Rage et martyrologue

Small_Bras_d_honneurDonc j’ai dû, selon les dispositions écosophiques, me rendre sur l’emplacement de collecte du verre, emballages et cartons, pour y déposer ce que l’on nous impose d’y trier. Notamment des bouteilles en verre, que jadis une économie moins imbécile et gaspilleuse, consignait. Je suis revenu plein de rage : quoi ! Nous entretenons nombre de paresseux parfaitement capables de travail, avec l’argent qu’on nous extorque, des « assistés » logés et nourris gratuitement grâce au socialisme municipal, et nous sommes obligés de faire un petit travail que ces parasites pourraient bien faire à notre place ? Serait-il monstrueux d’exiger de ces sous-citoyens (en réalité, des sujets, comme dirait Vautrin) rendent service, un tout petit peu, en échange des prébendes qu’ils reçoivent ? Ne vous méprenez pas : c’est pour eux que je parle ! Car en les maintenant dans cet abject état d’assistés, nous renonçons à en faire des citoyens, nous leur refusons la dignité de participer un peu à la vie de la cité. Naturellement, ces gueux à très courte vue s’en réjouissent, et la bien-pensance fait écho. Mais la réalité est là : sous couvert d’assistanat, nous fabriquons à la pelle des parasites asservis. Il paraît qu’on appelle ça « démocratie » et « égalité », « respect de l’autre » etc…

Mais est-ce respecter quelqu’un que de lui dénier la responsabilité et la participation à la vie de la Cité ? C’est pourtant ce qui se fait à grande échelle dans ce pays pourri. On leur donne une carte d’électeur parce que ça permet aux philistins de s’emparer du pouvoir, mais la carte ne fait pas le citoyen, loin de là. Il me vient soudain en mémoire une idée de Goethe : « Les idées générales et les grandes présomptions sont toujours en train de déchaîner d’affreux malheurs ». Plus exactement : « Des idées générales, jointes à une grande prétention, mettent sur la route des plus affreux malheurs. » (Maximes et réflexions, Première partie)

C’est en lisant collectivement L’identité malheureuse de Finkielkraut que j’ai appris cette maxime, moi qui n’avais lu de Goethe que Die Leiden des jungen Werthers (Les Souffrances du jeune Werther), roman passablement pénible. Goethe, après tout, n’était peut-être pas si shamallow que je le pensais. Passons… Vautrin a eu l’excellente idée de nous faire connaître le livre de Finkielkraut qui a déchaîné les fulminations de la bien-pensance : preuve que l’Académicien avait vu juste, car la bien-pensance est constamment à côté de la plaque en matière de jugement social et moral.

L’idée générale est assez proche de la nôtre : si la bien-pensance n’a pas fondamentalement tort de s’inquiéter du rejet de l’autre, elle est totalement ignorante des méfaits de certains autres et tente d’instituer une tolérance aveugle qui met en péril l’identité sociale. C’est ainsi que nous devenons étrangers dans notre propre pays et que toutes les valeurs dont a besoin une société pour vivre s’écroulent. Je pense que Vautrin reviendra sur cette question, pour le moment il est occupé à se colleter avec le fascisme du « genre », idée fumeuse soutenue par une gigantesque présomption. Celle des Guides et illuminés qui les suivent et font de la propagande pour leurs idées totalitaires. Finkielkraut figure au martyrologue de la Raison, fustigé qu’il est par de dangereux pignoufes. Il en va de même de Zemmour. La bien-pensance n’est pas, hélas, la seule à craindre la « zemmourisation des esprits » : il y a aussi des libéraux cosmopolites, européanistes en diable, pour ne pas reconnaître que le diagnostic donné par le polémiste est globalement vrai. L’analyse du Suicide Français correspond bien à une réalité ressentie par un nombre croissant de citoyens : « La société règne encore. Elle est composée de toutes ces associations humanitaristes, ces lobbies antiracistes, gays, féministes, communautaristes, qui vivent de subventions publiques distribuées par un État aboulique et clientéliste, tous ces médias bien-pensants, tous ces technocrates, intellocrates, médiacrates, sociologues, démographes, économistes, qui prétendent encore faire l’opinion à coups de leçons de morale et de statistiques arrangées, élaborent au sein d’innombrables commissions pédagogiques les programmes scolaires, rédigent les rapports sur la meilleure façon de « faire de l’en commun pour faire France » (sic). Pour eux, la cohérence culturelle qu’avait su conserver notre peuple, en dépit d’une importante immigration depuis le XIXe siècle, est suspecte ; l’exigence de l’assimilation, xénophobe ; l’attachement à notre histoire, nos grands hommes, notre roman national, la preuve de notre arrogance raciste. Tout doit être détruit, piétiné, saccagé. Le multiculturalisme américain doit nous servir de nouveau modèle, même s’il vient de l’esclavage et a longtemps flirté avec l’apartheid de fait. »

Nous sommes nationaux-libéraux, ChezRaoul, ce qui veut dire que nous refusons le droit à l’État de se mêler de tout, à commencer par l’économie, ce en quoi nous ne partageons nullement le national-bonapartisme d’Éric Zemmour. En revanche, nous sommes d’accord avec son diagnostic civilisationnel et sur le principe d’être maître chez soi. Qu’il soit haï par une bien-pensance, laquelle tente de le faire taire montre, comme dans le cas de l’Académicien, qu’il a écrit des choses sensées. J’avoue attendre avec impatience le livre du troisième larron de cette trinité maudite : Soumission, de Michel Houellebecq, décrivant l’arrivée au pouvoir d’un parti islamiste gagnant contre la candidate du FN avec la complicité des philistins médiatico-politiques. Nul doute que la bien-pensance aiguise déjà ses couteaux pour le dépecer, tant cette caste immonde déteste que l’on soit lucide, donc que l’on pense à contre-courant de sa folie meurtrière. J’achèterai ce roman, qu’on en soit sûr, et je rêve que la foule dévaste le brushing d’Aymeric Caron.

Trois penseurs, trois analystes au martyrologue. Ajoutons aussi quelqu’un qui a subi lui aussi l’ostracisme de la part des philistins : Richard Millet dont la « faute » a été d’essayer de comprendre Anders Breivik. « La parole critique a émigré sur les sites, les blogs, les forums généralement tenus par des écrivains ou des lecteurs, du moins ceux qui ne se laissent pas tromper par la Propaganda Staffel ni par le silence de l’opprobre. Ce silence, j’y suis habitué. Je le recherche, même, dans la mesure où il peut recevoir le nom d’anonymat, lorsque les livres que nous avons écrits finissent par dessiner de nous une figure qui nous échappe à la longue et qui est, ici-bas, notre vraie gloire. C’est pourquoi je ne me suis jamais vraiment soucié de l’accueil fait à mes livres : il me suffit qu’ils paraissent et que j’aie des lecteurs ; et je me demande comment vivent les auteurs régulièrement encensés par la critique, et quel rapport de maquereautage ils entretiennent avec la presse.  Celle-ci, de droite comme de gauche, n’est plus que la voix de l’idéologie dominante, social-démocrate, antiraciste, philanthropique, antichrétienne, mondialiste, déculturée, moralisatrice; et il ne me paraît pas que les « difficultés » qu’elle connaît représentent un « danger pour la démocratie »; la disparition, même, d’un journal comme Libération serait anecdotique, voire insignifiante dans le système d’inversion générale et de mensonge qui caractérise le capitalisme mondialisé ; bien au contraire, on ne pourrait que s’en réjouir (…), il me semble que nous sortirions de l’état d’hébétude et de servilité à quoi nous condamnent la prière quotidienne à la démocratie et la bondieuserie humaniste dans quoi le renoncement au catholicisme fait choir ceux qui ne savent plus qui ils sont. Pourquoi vouloir être informé, si cette information n’est que le bruit de la Propagande et le fond de roulement de l’inversion générale des valeurs ? Je n’ai que faire de l’opinion, qui est en grande partie prostitutionnelle, en tout cas pornographique, comme les « débats » ou les « talk shows ». A l’opinion, j’ai toujours préféré la parole libre, de la même façon que je vis dans la vérité du Christ, et qu’aux tièdes post-chrétiens je préfère les moines-soldats. » (voir le site de Richard Millet)

Il y a encore des hommes droits et lucides dans ce pays. Ils représentent ce qu’il reste de l’honneur et de la raison, dans une société perdue qui se délite et qui, bientôt, disparaîtra, puisque nulle barricade, nulle insurrection ne se profile à l’horizon.

Raymond

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