Le Songe d’une nuit de Walpurgis

Il était là. Pas besoin de se faire repérer, enveloppé dans son étrange cape, confondu dans le noir avec les gargouilles environnantes, sur un arc-boutant. Notre-Dame… Ah ! Ah ! Ah ! Le Malin attendait comme tout le monde la proclamation officielle des résultats du Second Tour, en ce sixième de mai. Les gens sont bêtes, de croire qu’il avait la prescience. L’avenir lui était aussi mystérieux qu’à un mortel, et comme tout un chacun il n’en connaîtrait l’accomplissement qu’à l’Annonce.

Oh ! A la différence des abrutis, il avait, lui, soigneusement travaillé à l’Aboutissement. Facile ! Il y a tellement de créatures sensibles à ses pompes et à ses œuvres, qu’il n’avait que l’embarras du choix pour corrompre : quatre-vingt pour cent de la caste médiatique, les gauchistes, la caste politique. Des médiocres, indubitablement, rien à voir avec ce Machiavel subissant sa punition dans un bolge du Huitième cercle, mais efficaces à répéter la même antienne maudite au peuple. Satan eut une petite pensée satisfaite pour Terra Nova : ces bougres-là s’entendent merveilleusement à instiller le poison dans les consciences. Sans compter les disciples de son locataire Mahomet, occupant au ventre fendu du 9ème Bolge, parmi les semeurs de discorde ou de schismes.

L’horloge de la cathédrale sonna. Mais qu’attendent-ils donc ? Il connut un moment de doute. Et si finalement le petit traître sautillant, artisan de sa propre perte, l’emportait malgré ses prévisions ? Tout soudain, il se fit un silence, le pays semblait retenir son souffle. Puis une étrange vague de « flocs ! », suivie d’une rumeur : « champagne ! ». Il comprit qu’il avait gagné : les bobos faisaient péter des roteuses, comme ils disent pour faire prolétaire. Lucifer ricana, car pour le socialiste moyen, le champagne était plutôt un mousseux de basse catégorie. Seuls les caciques auraient droit au Dom Pérignon, confortablement installés dans des brasseries branchées, avec des équipes de télévoyeurs pour couvrir leurs excès et recueillir leurs vains propos.

La foule des damnés envahit les places, en chantant victoire. Au nord-est, l’horizon tout soudain s’embrasa. Il comprit : la racaille fêtait elle aussi la victoire de ses protecteurs ; à défaut de feux d’artifice, on brûlait les voitures. Excellent ! Une rumeur grondante monta des rues, quelque chose comme « Allons au snack-bar ». Puis il rit de sa méprise : « Allahu Akbar ! » Bien sûr ! Un torrent de furies venues des zones conquises se déversa dans la vieille Capitale. Un martèlement féroce de pieds trépignants ébranlait les édifices : c’était les disciples de Méchancon, portant de keffieh palestinien, scandant durement le sol en hurlant « pas de murs entre les peuples, pas de peuples entre les murs ! ». Les suivaient, menés par la harpie Bouteldja, les Indigestes de la République. L’hystérique appelait au massacre des Blancs. Venaient ensuite les racistes du CRAN, vêtus de tutus de raphia et chantant « c’est la Hutte finâââle ! », puis les malfaisants des associations anti-racistes, MRAP, SOS et consorts. Il remarqua Fourest, Soppo.. Bien, ça ! Se dit le Diable.

La marée inhumaine coulait comme une lave, éclairée des lueurs sanglantes des brasiers consumant les véhicules renversés sur son passage. Plusieurs camions de pompiers et de police furent renversés, incendiés, et leurs équipages massacrés. On força des boutiques, les brigands et les barbares se livraient au pillage avec une délectation sans fin. Le Malin porta son regard vers l’Elysée : des forcenés, ignorant que le vaincu avait depuis longtemps déserté les lieux, tentaient d’en forcer les grilles et lançaient des grêles drues de projectiles.

Non loin de là, un cortège de voitures quittait la rue de Solférino, et gagna l’Hôtel de Ville. Sur le perron, le futur pensionnaire du Septième Cercle accueillit le brimborion vainqueur de cette comédie. Satan méprisait ce pâle naufrageur, sûr qu’il eût préféré un pécheur d’envergure, comme ce Dominique-nique-nique, mais enfin, même lui, l’Esprit qui Toujours Nie, n’est pas maître du Destin. On ferait avec. Peu à peu les caciques rejoignirent le groupe ; Satan reconnut la grosse islamophile maîtresse des Piscines, accompagnée de son protégé l’imam Amar Lasfar. Il paraît qu’ils vont la bombarder premier sinistre, plaisanta le Diable. Il reconnut également le Robespierre de pacotille, Montebourg, accompagné de sa concubine. Et une foule d’autorités religieuses, les représentant des sept-cents mosquées qui avaient contribué à ce triomphe, envahit le perron, noyant les officiels dans un océan enturbanné. Dominaient cet égout les silhouettes de l’imam Komhyrespir et de Ramadan Tarik. Une gargouille verdâtre, vraie image d’un gremlin, les rejoignit bientôt. Effa ! Sourit le Malin.

Amusé, le Bouc Cornu vit le fleuve noir et vociférant rejoindre les nouveaux maîtres de la République. « Baissez vos drapeaux, que l’on voie vos visages ! » leur dit d’une voix de fausset le tremblant potentat. Mais les bannières blanc et vert, frappées de l’étoile et du croissant, ne s’abaissèrent pas : elle étaient le symbole même de cette nuit. On fit même un gigantesque autodafé des emblèmes tricolores arrachés aux bâtiments publics. Au loin, la basilique de Saint-Denis flambait, et avec elle les corps des rois de France prisonniers en terre ennemie. Le Naufrageur tenta bien de calmer un peu les esprits, essayant vainement de couvrir le tumulte de sa voix chevrotante : « je serai le président de tous les Français ! » Cause toujours, bonhomme, pensa Satan.

On lapidait ici et là. Une malheureuse bobo, pieds et poings liés, succombait sous un déluge de pierres. Elle eut beau crier à ses bourreaux qu’elle était de leur côté, rien n’y fit, elle périt. Même pas au ciel, pensa Satan, car elle n’a pas eu le temps de se repentir de sa faute ! Paris flambait. Des millions de silhouettes dansaient devant les flammes une danse de sorcières en rut. Je n’avais pas vu cela depuis la nuit de Walpurgis, se réjouit le Diable. Ah ! De Gaulle ! Tu m’avais un jour fustigé en évoquant tes adversaires : Méphisto se présentant à Faust comme « Celui qui Toujours Nie ». Eh bien ! Regarde Paris, regarde les grandes villes de France ! Tout flambe dans mon apothéose ! Je vais faire ample moisson d’âmes ! Pour un peu, j’en remercierais Dieu d’avoir abandonné la Fille Aînée de son Eglise !

Là-dessus, comblé, Lucifer déploya ses ailes démesurées et s’envola vers l’Enfer, en faisant souffler un vent glacial sur le pays ruiné.

Tout à sa jubilation, il n’avait pas vu, dans l’ombre, l’impitoyable regard des Patriotes, ni entendu ce vœu : « qu’on me donne un fusil et des balles ! » Le Châtiment viendra. C’est affaire de sang, de sueur, de larmes et de patience.

Sacha.

 

 

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