République et res publica

Marion il y a des victoiresMarion se revendique républicaine contre les royalistes. Pourquoi pas ? Mais il faut garder à l’esprit qu’elle sait parfaitement que la France n’est pas née en 1789 et qu’elle a eu une histoire avant cette date. C’est pourquoi elle confesse appartenir à une génération « un peu saoulée par les valeurs de la République… qu’on nous sert en permanence et dont on ne sait pas ce qu’elle recouvre, ce qui évite d’aller sur le fond des idées…Je ne confonds pas la Ve République, qui est un régime politique, avec la France… » Propos iconoclastes non seulement pour les protecteurs des nuits de boue, mais aussi pour Tante Marine et Tonton Florian et même un membre du cabinet de Marine Le Pen a éprouvé le besoin de rappeler à la flamboyante nièce -ou plutôt à la caste politique qu’il faut bien brosser dans le sens du poil- que « le lien entre la nation et la République constitue l’axe central autour duquel s’articule la puissance française ».

Quelle blague ! La nation ? Elle était déjà à Bouvines, elle était avec Jehanne à Orléans et à Reims, elle n’a pas attendu l’épisode sanglant de la Révolution et la première République pour naître. Nos rois firent la France en mille ans, en deux siècles les républiques l’ont jetée à terre, et avec elle la Nation.

Qu’importe, au fond, le principe de repérage : Bourbon, Bonaparte ou République ? Il ne s’agit pas du « kratos », ici, mais simplement de l’« archê ». Le vrai problème est celui du « kratos », du pouvoir, et de sa délégation, donc très exactement celui de la démocratie ou de la tyrannie (au sens étymologique). Du pouvoir nous sommes la source. Mais puisque nous ne pouvons tout faire, nous le déléguons à un État qui exerce pour nous les rôles régaliens : défense nationale, protection des citoyens, relations avec l’étranger. Celui qui le reçoit en délégation ne reçoit pas en même temps un permis de régir la vie privée des citoyens. Lorsque le contrat prend cette forme de la responsabilité, c’est la démocratie : le pouvoir se reçoit en délégation et se rend, on rend des comptes, c’est finalement le peuple qui tient les guides ; dès qu’il s’agit de modifier les lois fondamentales, c’est le peuple qui décide par voie référendaire. Il n’est démocratie que directe.

La tyrannie confisque le pouvoir qu’elle extorque aux citoyens. À l’ancienne forme violente de l’extorsion par le meurtre, les castes politiques contemporaines ont substitué une forme de dénaturation de la délégation : la représentation. Les parlementaires sont élus parmi les membres de la caste et leur action échappe au contrôle populaire. C’est ainsi que l’on impose un traité de Lisbonne en violation du vote populaire, et une loi de dénaturation du mariage en contradiction avec la volonté populaire. C’est ainsi qu’un Estrosi, un Bertrand minoritaires se fontt élire grâce aux voix (et par les voies) de l’autre parti de la caste, le PS.

Une monarchie peut donc être démocratique ou tyrannique (voir Louis XIV), de même un empire, de même une république. Nous avons tous, j’espère, en mémoire les « républiques démocratiques » (exemple : la Corée du Nord) totalement tyranniques. La démocratie ne se confond donc pas avec la forme que prend le régime ; la preuve : il n’y a plus en Europe qu’une seule démocratie, la Suisse, et elle a la forme d’une confédération, pas d’une république.

C’est pourquoi il est vain de toujours bramer « République ! République ! » en sautant comme des cabris, et d’invoquer les « valeurs républicaines » : il n’y a aucune valeur spécifique au régime républicain.

Personnellement, je m’accommoderais aussi bien de la République que de Louis XX, si elle respectait la démocratie et si, pour reprendre le mot de Maurras, la république n’était pas « la femme sans tête ». Mais lorsque je constate l’extorsion du pouvoir par la caste dans le cadre d’une république, je ne me sens nullement « républicain ». Surtout si la république nous conduit à la charia !

Sacha

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